19e IMAGES HISPANO-AMÉRICAINES : 22 mars / 30 mars 2024

19e IMAGES HISPANO-AMÉRICAINES

22 mars / 30 mars 2024  

Film événement

La flor, un film de Mariano Llinás

La Flor Partie 1 : 3h30/  Partie 2 : 3h10/ Partie 3 : 3h25/ Partie 4 : 3h28

Argentine / De Mariano llinàs / Avec Elisa Carricajo, Valeria Correa,Pilar Gamboa, Laura Paredes

« La Flor » cambriole le cinéma en six épisodes. Chaque épisode correspond à un genre cinématographique. Le premier est une série B, comme les Américains avaient l’habitude d’en faire. Le second est un mélodrame musical avec une pointe de mystère. Le troisième est un film d’espionnage. Le quatrième est une mise en abîme du cinéma. Le cinquième revisite un vieux film français. Le sixième parle de femmes captives au 19e siècle. Mon tout forme « La Flor ».

Ces six épisodes, ces six genres ont un seul point commun : leurs quatre comédiennes.

D’un épisode à l’autre, « La Flor » change radicalement d’univers, et chaque actrice passe d’un monde à l’autre, d’une fiction à un autre, d’un emploi à un autre, comme dans un bal masqué. Ce sont les actrices qui font avancer le récit, ce sont elles aussi qu’au fur et à mesure, le film révèle. Au bout de l’histoire, à la fin du film, toutes ces images finiront par dresser leurs quatre portraits.

Bande annonce : Cliquez ici

Une critique du film par Alain Laplante

LA FLOR ( Mariano Llinásune fresque foisonnante

Mariano Llinás, réalisateur et scénariste de la nouvelle vague argentine nous offre son dernier opus déferlant, monumental, imprévisible tel un tsunami sur près de 14 heures distribué en quatre épisodes autonomes. Il aura fallu dix années de production (El Pampero) et un formidable travail d’équipe ( Laura Citarello et Alejo Moguillansky à la réalisation, Agustín Mendilaharzu à l’image ) pour que cet énorme projet voie le jour. Le film s’avère être un jeu ou plus précisément un puzzle qui se construit sous nos yeux et que nous reconstituons progressivement avec plaisir et délectation. On peut le voir aussi comme une série réinventée à la mode des récits populaires où chaque épisode nous tient cloués à l’écran d’une manière addictive comme un bing watching, insatiable besoin de dévorer le récit. Mariano Llinás nous entraîne alors du mélodrame, à la mise en abîme du cinéma, jusqu’au remake d’une partie de campagne de Jean Renoir avec une maestria rarement égalée. Quatre actrices: Elisa Carricajo, Valeria Correa, Pilar gamboa et Laura Paredes participent à la réussite du film. Issues du théâtre, (La piel de lava) elles composent de formidables personnages aux mille visages différents dans ce kaléidoscope où tout est possible. La flor est un ovni et en même temps un film de série B superbement construit que nous croyons reconnaître tant il nous est familier. Sa richesse est contenue dans son foisonnement entre la comédie musicale et le pastiche. Une vraie découverte, un film burlesque, baroque et comme le disait Mariano Llinás lui-même: «Un festin des arts, de nos aventures, de nos expériences, de notre réalité.» A consommer donc sans modération!

En présence de Cédric Lépine

Diplômé d’anthropologie et d’archéologie, Cédric Lépine n’en tombe pas moins amoureux du cinéma auquel il va consacrer une bonne partie de ses activités comme spécialiste du cinéma hispano-américain, pour des revues numériques en France et à l’étranger, comme collaborateur de nombreux festivals consacrés au cinéma latino, comme présentateur de films et comme animateur de séances. Déjà présent à la 14ème édition des Images hispano-américaines.  

Rencontre avec Mariano Llinás sur le thème du "scénario"

Lors du week end du 12 et 13 octobre 2019 est présenté au cinéma La Turbine par l’ADCH à Annecy le film fleuve événement de Mariano Llinás de près de 14 heures. Une nouvelle opportunité pour s’intéresser à l’indépendance du cinéma développé quelques mois plus tôt au festival Cinélatino, Rencontres de Toulouse avec le cinéaste autour de la question du scénario.

Mariano Llinás : La différence lorsque je travaille sur un scénario d’un film de Santiago Mitre et un scénario au sein de Pampero Cine, c’est qu’avec Santiago Mitre, il y a des producteurs. Dans ce cadre-là, le scénario ne s’écrit pas sans producteur : autrement dit, on ne travaille pas sans argent. Puisque quelqu’un a payé pour un scénario futur, il faut faire ce scénario et on ne peut pas le remettre en cause. Cette condition initiale d’écriture est d’abord fondamentale à préciser lorsque l’on parle de liberté dans l’écriture et la réalisation d’un film. Le travail d’Alejo Moguillansky avec lequel je collabore à l’écriture de ses scénarios est totalement différent. En effet, il commence à tourner différentes scènes qui pourront ou non devenir des films. Et en faisant ces films, nous avons conscience que nous ne gagnerons rien. Presque tous les films qu’Alejo a réalisé sont sortis du contexte dans lequel il devait réaliser pour gagner de l’argent comme on le voit notamment dans La Vendeuse d’allumettes. Il y a ainsi des films que l’on commence à faire parce que l’on veut les faire et d’autres parce que l’on est payé pour cela. C’est essentiel de le préciser.

Au sein d’El Pampero Cine, nous n’avons jamais été payé pour pouvoir réaliser un film et dès lors il n’y a pas de contrainte de scénario. Lorsqu’il n’y a pas quelqu’un qui finance un scénario, on peut se permettre de commencer directement à tourner. Si l’on suit ce schéma de pensée, on peut imaginer qu’un scénario est fait pour un producteur et en son absence, le scénario n’est plus nécessaire.

Lorsque je suis payé pour écrire un scénario, j’écris pendant deux mois durant lesquels le producteur intervient pour demander des réécritures. Le producteur prend le rôle du patron qui commande et lorsque celui-ci n’existe pas, nous pouvons prendre directement la caméra pour commencer à tourner sans le besoin d’écrire. Cela n’empêche pas d’écrire les dialogues que les comédiens liront, mais ce n’est pas cela que l’on appelle le scénario. Cette écriture aide aux répétitions sans pour autant constituer un scénario. C’est là une question intéressante pour comprendre le rapport entre les images et les mots.

Le vrai problème, c’est que le producteur recherche dans l’écriture d’un scénario les preuves que le film fonctionnera économiquement. Or, le producteur moins que quiconque n’est en mesure de savoir si un film peut marcher. L’histoire du cinéma est peuplé de scénarios auxquels les producteurs n’ont jamais cru et lorsque les films de ces scénarios rencontrent un succès, les producteurs réécrivent l’histoire officielle en affirmant qu’ils n’ont, depuis le début, jamais cessé de croire au scénario. L’inverse fonctionne également avec des producteurs qui imposent les différentes certitudes du succès avec tel acteur au casting : par exemple, la présence de Ricardo Darín devrait entraîner des entrées et lorsque malgré tout le film ne fonctionne pas dans les salles, cela démontre encore l’absence précise de règles pour déterminer les goûts des spectateurs. Car le public est volage.

Ce que recherche avant tout le producteur c’est une façon de contrôler le travail de ses ouvriers, dans ce cas les scénaristes et le metteur en scène. L’autre moment de contrôle du producteur se trouve au moment du montage. Le producteur déteste le tournage car c’est le moment de liberté des réalisateurs : c’est le moment où l’on peut faire ce que l’on veut, où personne d’autre, en dehors du tournage, ne saurait faire. Le tournage est ainsi un moment magique pour un réalisateur et qui se trouve au fondement de ce qu’est le cinéma. Le producteur peut ensuite prendre ces images et les commenter mais comme il ne sait pas les fabriquer, le tournage est le moment qu’il craint le plus dans la réalisation d’un film.

« La Flor » de Mariano Llinás © ARP Sélection

M.L. : C’est en effet là une fantaisie de notre part cette histoire. Personne sur le tournage de La Flor n’a eu besoin de lire de scénario. Étant donné que le scénario est quelque chose que l’on fait pendant le tournage et que ce dernier est réalisé de manière intermittente, nous ne sommes pas dans le cadre d’un tournage classique étendu par exemple sur six semaines. C’est un tournage qui s’est déroulé sur plusieurs années pendant les week ends lorsque nous avions du temps libre. Le scénario est alors quelque chose que l’on est en train de comprendre en même temps que l’on fait le film. À un moment donné, un assistant réalisateur m’a demandé d’écrire pour savoir ce qu’il devait faire : c’est évidemment utile d’écrire pour mettre en ordre nos pensées. En revanche, le scénario comme outil pour donner des ordres à chacun n’existe pas sur nos tournages au sein d’El Pampero Cine. En fait, c’est l’industrie qui a besoin du scénario.

Aux personnes qui réalisent leur premier film je demande pourquoi on écrit des films avant d’avoir des images. C’est à partir des images quel’on peut comprendre ce que l’on a fait. Pour penser un film, nousn’avons pas besoin de ce que l’on appelle des scénarios. D’ailleurs, les scénarios mentent toujours. Lorsque l’on écrit «Pablo marche dans la rue » dans un scénario, ce n’est qu’une promesse d’une réalisation future dont il n’y a encore aucune certitude. On parle ainsi de choses que l’on ne connaît pas parce que le tournage n’a pas eu lieu. Si l’on écrit le scénario après le tournage, nous sommes en revanche sûrs de ce que nous avons montré : les mots n’expriment alors plus des envies mais des certitudes. Je pense qu’un producteur devrait davantage être plus proche des certitudes que des envies.

M.L. : Tout dépend de ce que l’on entend sous le terme « scénario ». Par exemple, elles n’ont pas écrit une seule ligne des dialogues qu’elles ont interprété. Elles n’ont pas inventé l’histoire et dans le quatrième épisode, elles n’étaient pas informées de ce que l’on allait tourner. Ni elle, ni moi, ni personne ne comprenait alors le sujet même de ce que l’on tournait. Elles se rendaient alors sur le tournage pour faire ce qu’on leur demandait. Un autre exemple : lorsqu’elles parlent dans une séquence en français, elles ne comprennent pas ce qu’elles disent. Elles disposent alors d’une personne qui leur souffle les mots en français.

Cependant, le film est tellement pensé pour ces corps, ces visages, ces esprits de ces quatre femmes que l’on peut dire qu’elles ont été co-créatrices du film davantage que co-scénaristes. Si j’ai pris toutesles décisions sur le film, ce qui est le plus intéressant c’est que le film est davantage que ces décisions : c’est la matérialité réelle des images que l’on montre. Elles ont apporté leur propre réalité au film et c’est pour moi la plus grande collaboration à laquelle je n’ai jamais bénéficié jusque-là.

Souvent, le réel échappe alors que sur ce tournage le réel était très collaboratif. Elles étaient plus que quatre comédiennes : elles ne se contentaient pas que de jouer des rôles, elles étaient la matière même du film. Si le film était une pierre, la sculpture qui en résulterait serait le corps de ces femmes. C’est vrai qu’au début j’ai pensé que nous devions écrire tous ensemble le film. Au début, le film n’était qu’un prétexte pour passer du temps avec l’équipe La Piel de Lava et être plus proche d’elles. Je leur ai proposé de faire tout le film ensemble mais elles ont refusé. Nous avons par exemple avec Elisa Carricajo commencé à écrire ensemble quelques scènes de la première histoire mais à un moment nous avons compris que cela ne fonctionnait pas et elles préféraient que je dirige tout. Ce sont elles qui ont pris cette décision. Je crois que cela constitue pour elles une vraie prise de pouvoir, d’empowerment, chez elles. Sur leurs pièces de théâtre, elles font tout ensemble en tant que Piel de Lava : l’interprétation, l’écriture, la mise en scène, etc. mais à ce moment-là elles souhaitaient que la mise en scène comme l’écriture du film soient décidées par une autre personne qu’elles-mêmes. J’ai été ainsi très touché par cette forme de confiance.

La Compagnie de théâtre argentine “La Piel de Lava”

Entretien avec les membres de la compagnie de théâtre argentine "La Piel de Lava"

Cédric Lépine

« La Flor », film réalisé par Mariano Llinás, est le fruit dʼune étroite collaboration entre des gens de cinéma et des gens de théâtre, entre El Pampero Cine et la compagnie Piel de Lava dont le nom est issu de ces quatre actrices membres fondatrices : Pilar Gamboa, Elisa Carricajo, Laura Paredes etValeria Correa.

El Pampero Cine a été influencé dès ses débuts par le monde du théâtre indépendant de Buenos Aires et La Flor est une œuvre très créative à mi-chemin entre cinéma et théâtre. La compagnie Piel de Lava a été créée en 2003, presque en même temps quʼEl Pampero Cine, et depuis lors, elle a monté cinq œuvres : Colores verdaderos (2003), Neblina (2006), Tren (2010), Museo (2014) et Petróleo (2018). En même temps, les actrices fondatrices de la compagnie de théâtre travaillent aussi pour le cinéma, en particulier avec El Pampero Cine, et en parallèle sur La Flor, dont le tournage a duré neuf ans. Le quatuor est ici réuni pour répondre dʼune seule voix à quelques-unes de nos questions.

De gauche à droite : Elisa Carricajo, Pilar Gamboa, Valeria Correa et Laura Paredes. © DR

Piel de Lava : Le contexte de naissance de Piel de Lava est tout particulièrement lié à nos ateliers de formation. Nous nous sommes rencontrées durant une période bien spécifique que traversait le théâtre indépendant de Buenos Aires, un moment où certains studios de formation tʼentraînaient à jouer en étant attentif à strictement tout. La célèbre – ou pas si célèbre – dramaturgie de lʼacteur ! Ces ateliers redéfinissaient le rôle de lʼacteur en tant que producteur de sens et créateur de langage. Cʼest là que nous nous sommes connues. Nous ne voulions pas juste être actrices, nous nous intéressions beaucoup à la mise en scène et à la dramaturgie, mais en même temps, nous adorions être actrices. Voilà comment est née Piel de Lava, comme un laboratoire qui nous permettait de combiner la mise en scène, le jeu et la dramaturgie.

Piel de Lava : Les rôles sont partagés puisque chacune dʼentre nous écrit et joue à la fois. Mais en ce qui concerne lʼécriture delʼœuvre par exemple, nous faisons en sorte que celle qui a écrit telle ou telle scène ne se charge pas de sa relecture. Cʼest comme cela quʼapparaît dans nos pièces un ton qui nʼémane pas dʼune seule personne, mais bien des besoins de ladite création. Les rôles changent ensuite au fil du temps. Et nous soumettons toujours nos travaux à un regard extérieur, une codirection qui se mêle à la nôtre, au sein-même de la scène, sans hiérarchie prédéfinie.

Piel de Lava : Les univers de chacune des œuvres sont apparus peu à peu, et nous supposons quʼils accompagnaient, dʼune certaine manière, les diverses étapes que nous vivions ensemble. Et en parallèle, assez logiquement, la maîtrise de notre propre technique est allée croissant. On nʼa jamais écrit des œuvres qui ne renfermaient quʼun seul univers, il y avait aussi un dispositif ou un procédé scénique qui nous obsédait pour telle ou telle raison. Notre première pièce, par exemple, parlait du travail. Clairement, elle a été le résultat dʼune époque de notre vie où nous étions prisonnières dʼun travail dont nous ne voulions pas. Cʼétait donc le “thème”. Mais le dispositif scénique était le suivant : deux bureaux séparés par une cloison. Les secrétaires parlaient tout lʼaprès-midi sans pouvoir se regarder dans les yeux. Cʼest alors que lʼunivers et le dispositif sʼunissent et que lʼon perd de vue le “thème”. Et cʼest la même chose avec toutes les pièces : un monde et une règle du jeu imposée à la base et que nous suivons au pied de la lettre. Cʼest ainsi que nous travaillons.

Piel de Lava : Définir notre théâtre ? Cʼest vraiment difficile. Mais sʼil faut lʼinscrire dans une tradition, nous dirions que cʼest celle de la dramaturgie de lʼacteur.Lʼacteur comme producteur de sens et de langage. Nous ne sommes pas des commanditaires. Nous écrivons pour nous-mêmes, en pensant à ce que chacune dʼentre nous pourrait ou voudrait tester. Nous nous efforçons de sortir de nos zones de confort. Cʼest lʼobjectif de ce groupe depuis des années.

De gauche à droite : Pilar Gamboa, Elisa Carricajo, Laura Paredes et Valeria Correa © DR

Piel de Lava : Nous avons du mal à trouver une différence entre le jeu de théâtre et le langage cinématographique, peut-être parce quʼelles sont très nombreuses. La plus significative est sûrement liée aux niveaux dʼintensité. Lʼart de “lʼéconomie”, mais sans perdre la force ni lʼémotion.

Mariano [Llinás] nous a dit un jour : “Attention à lʼintensité, la caméra est comme un oiseau, elle sʼeffraie facilement”. Et je crois que cela nous a servi au fil du travail. Laisser la caméra capter les états émotionnels sans jamais les imposer ni les forcer. La caméra voit les pensées. La caméra traque les émotions. Pas besoin de trop manipuler.

Piel de Lava : Nous croyons que lʼinspiration théâtrale majeure apportée à La Flor, ce sont ses acteurs. Les nombreux membres du casting sont en grande partie des créateurs du théâtre indépendant de Buenos Aires. Ce sont non seulement des acteursqui ont tous des particularités très marquées, mais qui en plus comprenaient clairement les modes de production du film durant toutes ces années. Le modèle de production de La Flor et notre manière de faire du théâtre se marient bien.

Piel de Lava : Lʼidentité de la compagnie est présente mais, paradoxalement, nous perdions souvent le contact avec ce que faisaient les autres. Parfois, durant des mois, nous ne partagions pas la moindre scène. Mais Mariano savait de quoi nous étions capables, précisément grâce à la force quʼil avait perçue dans nos pièces. Il nous parlait de la “machine fictionnelle” qui se mettait en branle lorsque nous nous mettions à jouer ensemble. Et cʼest quelque chose qui perdurait, intimement, même lorsque nous ne partagions pas les scènes. El Pampero Cine et Piel de Lava sont comme frère et sœur, dʼune certaine manière. Oui, cʼest exactement ça. Une sorte de fraternité indestructible sʼest tissée au fil des ans entre les deux groupes. Bien sûr nous sommes amis, et nous nous sommes beaucoup amusés durant toutes ces années, mais au-delà de cela, il y a eu une communion qui était liée à une certaine similitude entre les modes de production et à la manière dont nous comprenions et accompagnions mutuellement les processus créatifs. Personne nʼétait pressé de finir La Flor. Le film nous permettait dʼêtre ensemble constamment. De tourner et dʼêtre une famille.